IA et profession dentaire – entretien avec David Gruson

L’intelligence artificielle va-t-elle transformer ou révolutionner la pratique dentaire ? Quelle que soit la réponse, tout praticien doit en comprendre les enjeux et la place de l’humain dans son usage. David Gruson*, fondateur d’Ethik-IA qui accompagne le secteur de la santé en matière d’IA, est l’invité de la séance phare. Il nous parle d’intelligence artificielle (IA) appliquée à la profession dentaire

Pourquoi est-il essentiel pour les professionnels de la santé bucco-dentaire de se tenir informés des avancées de l’intelligence artificielle ?

La profession dentaire a été assez précurseur dans l’utilisation de l’IA, notamment pour l’analyse de la littérature médicale ou la synthèse des dossiers patients, permettant de gagner un temps précieux dans la prise en charge au cabinet. L’évolution de l’IA en santé est particulièrement rapide depuis 2023 avec l’arrivée de l’IA générative comme ChatGPT (capable de générer du texte, des images, des vidéos ou d’autres médias). Ce qui paraissait abstrait et éloigné du réel pour un certain nombre de professionnels est aujourd’hui une réalité très pratique qui concerne des champs de la santé dans lesquels l’IA générative est opérationnelle et vous concerne (voir l’encadré – en bas de page).

Quels changements sont à prévoir pour 2025 ?

La technologie avance, mais aussi la régulation avec la publication le 12 juillet 2024 du règlement européen sur l’IA. Cette règlementation porte la marque de la profession bucco-dentaire sur la notion de garantie humaine sur les systèmes d’IA, un principe fondamental et obligatoire. Le contrôle médical humain doit rester présent et opposable à l’IA. Cette réglementation entrera en vigueur en août 2025, ce qui nécessite une préparation aussi bien pour les industriels que pour les professionnels du secteur. Je vous expliquerai comment vous familiariser avec les outils de l’IA et comment les intégrer de manière éthique et sécurisée dans un usage quotidien.

Au Congrès de l’ADF je vais donner, d’une part, des cas pratiques de l’IA telle qu’elle se diffuse dans la pratique bucco-dentaire et en santé en général et, d’autre part, expliquer quel va être le nouveau cap de régulation dans la garantie humaine.

Quels sont les défis à venir pour la profession dentaire et quel message allez-vous adresser à la profession lors de votre prise de parole au Congrès de l’ADF le mercredi 27 novembre prochain ?

Le principal défi sera de réussir à mettre à l’échelle ces systèmes d’IA tout en garantissant le contrôle humain d’ici 2025. Il n’y a pas à redouter ce cap, l’IA représente une formidable opportunité pour la profession dentaire, à condition de bien l’intégrer. Les professionnels du secteur doivent continuer à anticiper ces évolutions et à préparer l’avenir pour tirer parti des bénéfices de l’IA tout en maîtrisant ses risques.

* David Gruson est fondateur d’Ethik-IA et directeur de programme La Poste Santé & Autonomie dont l’objectif est d’accompagner les professionnels de santé, les industries de santé autour de services pour la santé à domicile.

 

Rendez-vous à la séance phare,
mercredi 27 novembre 2024 de 9h à 12h
dans le Grand amphithéâtre du Palais des Congrès.

+ d’infos sur la séance phare

L’IA, le futur est déjà présent

Depuis les années 1980 : La conception et fabrication assistées par ordinateur (CFAO) de dispositifs dentaires représente la première application de l’IA en odontologie. À elle seule, la CFAO capte les données dentaires d’intérêt, traite ces données par le logiciel CFAO, puis fabrique le dispositif dentaire par une machine-outil commandée numériquement. L’IA fait donc partie du quotidien de la pratique dentaire depuis plusieurs décennies.

Aujourd’hui : Si vous détenez une caméra intraorale capable d’effectuer un tracé des limites prothétiques, alors vous utilisez là aussi de l’intelligence artificielle capable de distinguer la limite entre la dent et la gencive. L’IA arrive peu à peu à distinguer ce qui est physiologique, elle parviendra donc sous peu à reconnaitre ce qui est pathologique, comme une carie. Autre exemple, aujourd’hui il est possible de fusionner les données du cone beam et de la caméra intraorale.

Demain : L’IA permettra d’interpréter les données issues du cone beam et de la caméra intraorale avec pour défi de fournir au praticien une analyse des images et de l’informer de la situation clinique de son patient.

Dans un avenir proche : Les praticiens auront recours à des robots chirurgicaux à pilotage assisté par l’IA. Les logiciels permettront de reconnaitre les lésions dermatologiques buccales, et la planification prothétique pourrait avoir lieu à partir de simulations virtuelles du patient, le « jumeau numérique ». L’IA offrira également des applications pour prévoir des malpositions dentaires ou détecter précocement un bruxisme.